Calcul, Morale et Esclavage

couverture livre Bastide et SteinerLe lundi 7 mars à 5 h pm, la salle FOKAL Unesco accueille Caroline Oudin-Bastide et Philippe Steiner qui présenteront une conférence autour de leur livre : Calcul et Morale ; Coûts de l’esclavage et valeur de l’émancipation (XVIIIe-XIXe siècle). L’accès à la salle est libre.

En 1771, dans deux articles publiés dans les Ephémérides du Citoyen, Pierre-Samuel Du Pont introduit dans le débat sur l’abolition de la servitude un élément rhétorique inédit : le calcul. Il en restera partie prenante jusqu’à l’abolition de la servitude. En démontrant que les maîtres et/ou la nation toute entière trouveraient leur intérêt dans l’emploi d’une main-d’œuvre libre dans les colonies, les calculateurs abolitionnistes prétendent mettre au jour l’irrationalité des défenseurs coloniaux et métropolitains de la servitude 

; leur dessein est d’éclairer les divers collectifs sur leur véritable intérêt qui coïncide avec le juste. Accusant les antiesclavagistes de se laisser aveugler par leurs principes philanthropiques, les colons revendiquent pour leur part la parfaite rationalité du système esclavagiste, seul capable, au moins dans le court et moyen terme, de préserver les intérêts de tous. Les calculs de coûts comparatifs du travail libre et du travail débouchent sur une réflexion sur la productivité des esclaves et des travailleurs libres et, au-delà, sur le statut le plus propre à développer les potentialités laborieuses des affranchis.

 

4ème de couverture du livre

Des premiers textes abolitionnistes du début du XVIIIe siècle à son abolition finale en 1848, la question de l’esclavage resta au cœur de la science politique française. Cette discussion, dont les débats révolutionnaires et l’abolition de 1793 ne constituèrent qu’un moment, vit s’affronter valeurs morales et calculs économiques. Écrit par une historienne de l’esclavage et un sociologue de la pensée économique, ce livre retrace le débat de longue durée au cours duquel économistes, abolitionnistes et colons s’affrontèrent, en mobilisant des instruments statistiques d’une précision croissante, sur la question de l’efficience amorale de l’économie de plantation.

Aujourd’hui connu des seuls historiens de l’esclavage et de la pensée économique, ce débat mobilisa les meilleurs penseurs français, de Du Pont de Nemours à Tocqueville, en passant par Turgot, Condorcet et Jean-Baptiste Say. Attentif aux conditions de l’affrontement intellectuel et à l’enchaînement des arguments et des oppositions, ce livre rappelle combien la naissance d’une science sociale quantitative, alors à ses débuts, contribua à replacer sur leur vrai terrain, moral et politique, la question de l’esclavage et l’idée de l’émancipation. La leçon vaut aussi pour aujourd'hui.

Caroline Oudin-Bastide et Philippe Steiner, Calcul et Morale, Albin Michel, Paris, 2015

 

Les intervenants :

Caroline OudinCaroline Oudin-Bastide est historienne, spécialiste de l’esclavage aux Antilles. Sa thèse réalisée à l’Ecole des Hautes Études en Sciences Sociales a été consacrée à la relation au travail dans la société esclavagiste des îles françaises. Elle a été publiée sous le titre Travail, capitalisme et société esclavagiste, aux éditions La Découverte, Paris, 2005. L’ouvrage est devenu une référence incontournable pour les chercheurs dans ce domaine.

Elle a, par la suite, approfondi sa réflexion sur les relations maîtres-esclaves (violence, résistance, système de croyances), et l’articulation entre les divers pouvoirs (privé, judiciaire, politique) à travers divers ouvrages : Des nègres et des juges : la scandaleuse affaire Spoutourne, Paris, Editions Complexe, 2008 ; L’effroi et la terreur. Esclavage, poison et sorcellerie aux Antilles, Paris, La Découverte, 2013 ; Maîtres accusés, esclaves accusateurs. Les procès Gosset et Vivié, Martinique 1848, Rouen, Presses de l’université de Rouen, à paraître septembre 2015).

 

 

 

 

philippe SteinerPhilippe Steiner est professeur de sociologie à l’université de Paris-Sorbonne ; il est également membre senior de l’Institut universitaire de France. Ses recherches portent sur l’histoire des sciences sociales et sur la sociologie économique dont il est le principal introducteur en France.

Il est un spécialiste de l’histoire de l’économie politique en France, et un contributeur régulier sur ces questions dans les revues internationales (History of Political Economy, Journal of the History of Economic Thought, European Journal of the History of Economic Theory). Sa thèse sur la Physiocratie a été publiée sous le titre de La « science nouvelle » de l’économie politique, Paris, Presses universitaires de France, 1998. Parmi ses travaux d’histoire des sciences sociales en rapport avec l’ouvrage figurent également : Sociologie de la connaissance économique. Essai sur les rationalisations de la pensée économique en France (1750-1850), Paris, Presses universitaires de France, 1998 (the book has received the Grammatikakis award of the Institut de France) et l’édition de deux volumes de textes : La pensée économique en France pendant la Révolution (en collaboration avec G. Faccarello, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1992) et La diffusion internationale de la Physiocratie, 18e-19e siècles (en collaboration avec B. Delmas et T. Demals, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1995). Philippe Steiner est également un des éditeurs des Œuvres complètes de Jean-Baptiste Say et a directement contribué à l’édition du volume I (Traité d’économie politique, Paris, Economica, 2006), du volume IV (Leçons d’économie politique, Paris, Economica, 2003) et du volume III (Catéchisme d’économie politique et autres essais, Paris, Economica, forthcoming, 2015).

Dans le domaine de la sociologie économique, son ouvrage d’introduction (La sociologie économique, Paris, La découverte 1999) en est à sa 4ème édition ; l’ouvrage a été traduit en italien et portugais (Brésil). Il a récemment publié La transplantation d’organes : un commerce nouveau entre êtres humains, Paris, Gallimard, 2010 ; Durkheim and the Birth of Economic Sociology, Princeton, Princeton university press, 2011 ; Les rémunérations obscènes, Paris, La Découverte, 2011 (Italian translation, Pisa, 2013). Il a également co-dirigé le Traité d’économie politique (en collaboration avec François Vatin), Paris, Presses universitaires de France, second edition, 2013 and Marchés contestés. Quand le marché rencontre la morale, (en collaboration avec M. Trespeuch), Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2015.

 

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