Le Club de Débat du Cap-Haïtien se mobilise contre la domesticité des enfants en Haïti

‘’Tout timoun se timoun ; tout timoun gen dwa, tout timoun dwe mennen aktivite timoun. Pwoteje timoun jodi se asire demen san kè sote.’’

20220326 P1031881Le Club de de Débat du Cap-Haitien a organisé une journée de sensibilisation sur le droit des enfants en domesticité le samedi 26 mars 2022, au Collège Regina Assumpta. Plus de quatre-vingt jeunes (80) participé tout au long de cette journée spéciale, à l’auditorium du Collège Regina Assumpta.

Encadrée par les programmes Initiative Jeunes et Education Citoyenne de FOKAL, l’activité a été organisée et exécutée par les jeunes (sous l’œil vigilant des animateurs), dans le but d‘apporter des changements au sein de leur communauté ; ce qui leur a permis du coup de mettre leur sens de responsabilité, de leadership et d’esprit d’équipe à l’épreuve.

La journée s’est lancée avec une grande conférence animée par Markly R. D. Charles, un jeune du club, et deux intervenants de haut calibre : Rachel Saint-Julien, journaliste, juriste publique et activiste des droits de l’enfant, et, Edny Pierre, psychologue et sexothérapeute. La thématique générale était : DOMESTICITÉ ET DROITS DES ENFANTS ; avec pour sujet : « la domesticité des enfants en Haïti, entre enjeux, causes et conséquences ». Cette dernière devait répondre à la question : « Peut-on sortir de cette impasse avec un cadre socio-légal ?», car nous le savons tous, poser les problèmes c’est bien mais proposer des solutions concrètes, c’est ce dont on a besoin.  

La suite de l’activité s’est tournée vers les ateliers autour des droits des enfants et des jeux éducatifs. Deux ateliers ont été réalisés, le premier sur l’ensemble des droits des enfants, historicité, ce que dit la Constitution, les conventions internationales sur les droits des enfants, les recours et processus en cas d’abus, de violence et de maltraitance sur enfant ; les institutions nationales et internationales à contacter le cas échéant. Cet atelier a été dirigé par un autre membre du Club Jeans David Aléus. Ils ont appris à identifier certains cas de restavèk, les dénoncer auprès des institutions haïtiennes qui peuvent prendre en charge les recours et porter des solutions.

Pour faire suite à cet atelier ; Schlyver Névélus, Roselande Dupont et Benjamin François ont enchainé directement avec l’atelier-jeu : « une pancarte, un choix, un mouvement ». C’est un exercice mélangeant compréhension des concepts et thèmes développés dans le premier atelier, et créativité pour trouver une note, un slogan authentique, le tout se fait par un jeu de balle qui se passe de mains en mains. La personne qui manquait la balle devait expliquer un concept et trouver un slogan qui supporte les droits des enfants en domesticité, selon une couleur spécifique. Ensuite ensemble, ils ont fait un mini parcours, dans l’enceinte de l’établissement, en signe de protestation contre toutes les formes de domesticité sur les enfants en Haïti.

20220326 P1031923Cette journée s’est clôturée par un match de débat en format Karl Popper, en créole haïtien, autour de l’énoncé qui stipule : « Leta ayisyen ta dwe entèdi tout fòm domestisite sou timoun ». L’enjeu du match s’est porté autour des pratiques domestiques qui ne devraient pas être confondues avec la domesticité et l’aide que l’Etat accorde à certaines familles de recevoir des enfants, qui selon les équipes n’étaient qu’une couverture pour faire le sale besogne de la domesticité, de la maltraitance voire même de trafic d’enfant. Il a aussi été mis en exergue le fait que certaines lois ne sont toujours pas correctement appliquées en Haïti, c’est là l‘un des plus grands défis à la création de l’environnement sain et sécuritaire que nous devons léguer à la génération future.

A l’issue de la journée certains jeunes et parents ont réagi avec enthousiasme à la tenue de l’activité ; Saint-Jacques Jean Richard déclara : « Je n’ai jamais pensé que le problème de la domesticité était aussi présent dans notre communauté, j’ai 32 ans et pour moi, les histoires d’enfants en domesticité se résumaient à Sentaniz de Maurice Sixto. Je reste encore impressionné par ces jeunes qui discutent échangent autour de sujets aussi importants. J’ai vraiment beaucoup appris, c’est un travail qui devrait être fait dans toutes les écoles, on en a grand besoin». « Je crois avoir eu chez moi, des enfants en domesticité, sans le savoir ; avant aujourd’hui, je ne comprenais pas ce que ce mot voulait dire et impliquait. J’ai la honte, je me sens lourde », dixit une jeune écolière.

«  Nous pensons fort souvent que la problématique des ‘’restavèk’’ en Haïti est dépassé complètement ; mais malencontreusement la réalité est tout autre. C’est dans une perspective de mettre en exergue ce mal qui déchire nos communautés mais aussi proposer des alternatives concrètes, que cette action de sensibilisation a eu lieu », explique Alendy Almonor, animateur Club de Débat du Cap-Haïtien.

 photo5096307116129495480La domesticité des enfants en Haïti est une réalité, elle prend aujourd’hui plus de gants, mais elle est bien présente et continue de ravager la vie de jeunes âmes innocentes. Sous couvert, de payer la scolarité dans un établissement respectable, voire même de haut calibre, d’offrir le gite, le couvert et quelques vêtements, de nombreuses familles accueillent des fillettes qui devront s’occuper de tout dans un ménage. Et cela implique la majeure partie du temps des taches au-dessus des capacités physiques de l’enfant, qui tombe malade très souvent, et qui ne verront jamais un médecin. Une jeune du club, qui a été dans cette situation délicate témoigne : « Yo te mete m lekòl nan gwo lekòl, yo te banm manje epi yo te ban m rad, men chak jou se mwen pouki fè tout bagay nan kay la. Mwen te dwe lave pase, netwaye, fè manje. Mwen pat janm vrèman gen tan pou m travay ni etidye menm jan ak lòt timoun yo. Mwen toujou fatige, mwen toujou gen doulè, chak fwa mwen mande pou mennem lopital ; yo di m al dòmi se travay mwen pa vle travay. Mwen pase sis lane konsa ap sibi tout kalite twomatis ak jouman jiskaske mwen sove kite kay la, sa gen kèk mwa, mal jwenn manmanm, mwen pat kapab ankò… ». Un témoignage qui a glacé le sang à bon nombre de participants.

Il est à rappeler, que ce projet de sensibilisation, rentre dans le cadre du partenariat de la FOKAL avec AJULIH, un programme d’Avocats Sans Frontières Canada. Cette activité est la résultante d’un concours de projet de sensibilisation, réalisé lors du camp national de débat aux Cayes, en juillet 2019. Trois clubs lauréats du concours avaient à réaliser un projet de la sorte : Cap-Haïtien, Camp-Perrin et Santo. Le Club du Cap a pu finalement boucler son action de sensibilisation et est prêt à relever de nouveaux challenges en cette année de grands changements dans le programme Initiatives Jeunes.

 

Alendy ALMONOR

Animateur Club de Débat du Cap-Haitien

Adresse et contact

FOKAL - OPEN SOCIETY FOUNDATION HAITI
143, Avenue Christophe BP 2720 HT 6112
Port-au-Prince,Haïti | Tel : (509) 2813-1694

logos 3

 

 

 

 

Mots-clés

S'abonner à nouvèl FOKAL

Copyright © 2017 FOKAL. | Design by: jehilaire@logipam.com