Ramener l'eau dans les communautés d'agriculteurs du Sud   

IMGL4186 copyPendant plus d’un mois après le passage du tremblement de terre du 14 août 2021, des communautés de fermiers dépendant du plus important canal d’irrigation de la commune de Camp-Perrin n’avaient aucun accès à l’eau pour leurs plantations. Des éboulements provoqués par le séisme empêchaient la circulation de l’eau. Grâce à une intervention de l’Association des riverains du Canal d’Avezac soutenue par FOKAL dans le cadre de son programme de solidarité post-séisme, l’eau circule depuis deux mois maintenant dans ce Canal, datant de l’époque coloniale en 1759. Une équipe de FOKAL et de Ayiti Demen a visité les lieux.

Le tremblement de terre du 14 août a surpris Eval Sylnéus, un usager du Canal d’Avezac, avec un de ses fils dans son jardin. Depuis 1970, Eval utilise l’eau du canal pour ses cultures. Ce septuagénaire cultive des légumineuses, des tubercules et des produits maraîchers qu’il vend aux consommateurs locaux à Camp-Perrin et aux Cayes. Depuis le tremblement de terre et l’absence d’eau dans le Canal, Eval a arrêté ses activités. Le canal, importante infrastructure agricole de la région, irrigue quelques 3 500 hectares dans les plaines de Camp-Perrin et des Cayes et fait vivre entre 6 000 et 7 000 familles comme celle d’Eval. L’eau est utilisée non seulement pour l’irrigation des terres et l’abreuvage des bêtes, mais aussi pour la lessive et dans certains endroits, après traitement, à se désaltérer.

« Le canal est un bien commun. C’est une réussite pour la communauté. Beaucoup de jeunes devenus agronomes, secrétaires, ingénieurs… C’est grâce à ce canal, car il nous a permis de payer leur scolarité. Quand on n’arrive pas à l’utiliser, c’est une grande perte pour nous tous», explique le cultivateur, assis sur sa galerie avec sa femme, en train d'égrener du maïs.

L’intervention dans le canal au lendemain du séisme   

Pour mieux comprendre le fonctionnement du canal et observer les points de fissure causés par le séisme et les travaux réalisés, l’équipe a marché plus de deux kilomètres au long du Canal, du point de captage de l’eau de la rivière au point de séparation des branches secondaires : labranche de Laborde, longue de 14 kilomètres et celle de Pemel, longue de 12 kilomètres. Vingt-six (26) canaux secondaires y sont rattachés.Pour cette visite, l’Association des irrigants du Canal d’Avezac (AIDA) a désigné son président, Monsieur Esio Charles. L’association avait contacté FOKAL pour soutenir les premiers travaux de déblaiement du Canal obstrué par les éboulements à sept points différents. 

«Nous avons démarré les premiers travaux avec environ 70 bénévoles de la ville. Nous avons motivé les membres de la communauté pour cet effort. Mais devant l’ampleur des dégâts, il nous fallait un soutien. Grâce à l’appui de FOKAL et de la direction départementale du Sud, nous avons pu déblayer le canal et ramener l’eau un mois après le tremblement de terre.», explique Esio, montrant des piles de terre évacuées du Canal. Les éboulements n’ont pas fait que bloquer la circulation de l’eau, depuis le point de captage, la rivière ne pouvait pas alimenter le canal et des parties de mur de soutènement sont fissurées ou détruites. De près, l’on peut constater les risques d’un nouvel ensablement à défaut de réparation, car les endroits détruits sont au pied de petites montagnes (voir la photo ci-contre).

Pour réaliser ces travaux, le soutien financier de la fondation a permis de créer des dizaines d’emplois temporaires, de nourrir les bénévoles mobilisés pendant de longues heures, de louer des engins lourds tels qu’un excavateur et un camion à benne basculante, des outils comme des pelles, des brouettes et un marteau-piqueur.

«Ce canal est très important pour la région. Il permet aux usagers de faire jusqu’à quatre récoltes par année. Les produits cultivés ne restent pas seulement aux Cayes et à Camp-Perrin, ils vont dans tout le pays. Les gens comptaient vraiment sur ces travaux pour la continuité de leurs activités économiques», ajoute Esio Charles, ancien maire de la ville de Camp-Perrin. Des travaux de maçonnerie sont nécessaires pour réparer les endroits fissurés, renforcer des murs de soutènement ou construire des tronçons. 

Une campagne de plantation sauvée, mais une plus grande autonomie souhaitée 

Avec l’eau qui est revenue dans le Canal depuis plus d’un mois, la campagne d’hiver de plantation de légumineuses n’est donc plus en danger. Cette campagne débute chaque année au cours du mois de novembre. Cependant, les usagers du Canal souhaitent que l’Association puisse disposer de ses propres matériels à l’avenir pour renforcer leurs capacités d’action et leur temps de réaction face à des phénomènes de cette nature. «Un de nos plus grands besoins au sein de l’Association est d’avoir sur place notre propre matériel pour ramener l’eau dans le Canal dès qu’il y a un problème, […] car souvent après une forte pluie, la ravière peut dévier de son lit, ce qui diverge l’eau du point de captage. Si on pouvait avoir notre propre excavatrice ou un backhoe loader, pour nettoyer régulièrement le canal, ce serait nettement mieux pour nous », indique Esio Charles. 

Pour Eval Sylnéus, c’est plus que nécessaire : « Nous aimerions que ce canal n’ait pas de ratement. Les matériels sont extrêmement importants. Ce canal est notre âme, nos deux yeux.» 

 

A propos de AIDA et du Canal d’Avezac 

AIDA est constituée d’un réseau de 180 membres et dirigé par un comité exécutif de 9 membres. Pour prendre en compte les besoins de tous les usagers, l’Association a créé des sous-comités du Canal (SCC), lesquels sont responsables des canaux secondaires de plusieurs localités branchés au Canal d’Avezac, ainsi que des Groupement des usagers (GDU) de chacun des canaux secondaires. Ces groupements sont responsables du nettoyage de chacun des embranchements correspondants à leur localité. 

Il a fallu six ans à Pierre Valentin d’Avezac, entre 1759 à 1765, pour finaliser la construction du Canal d’Avezac. De nombreuses interventions ultérieures ont eu lieu pour maintenir le Canal en état depuis sa création.

A propos du programme de solidarité post-séisme de FOKAL  

À la suite du tremblement de terre dévastateur de magnitude 7,2 et à la tempête tropicale Grace qui ont frappé le Grand Sud d'Haïti en août dernier, FOKAL a proposé une initiative pour soutenir la population des zones affectées qui ont des besoins désespérés en nourriture, soins de santé, abris et eau. Avec Ayiti Demen, FOKAL a lancé une campagne de levée de fonds qui a reçu près de 700.000 dollars de plus de 2750 individus, et 8 fondations.  Les projets soutenus sont menés par des organisations locales qui ont identifié leurs propres besoins.

Au cours de la première phase de cette initiative (août-novembre), les fonds servent à acheter de la nourriture, de l'eau potable, des fournitures médicales, des bâches, des outils, des kits d'hygiène, etc., et à payer la main-d'œuvre pour les déblaiements des canaux d'irrigation des zones concernées. Dans une seconde phase, suite aux rapports des organisations, un investissement à plus long terme sera mis en place et concernera principalement la production (intervention dans la chaîne de valeur de certains secteurs agricoles prometteurs), le développement d'autres secteurs (tels que l'apiculture, la pêche, l'élevage et le stockage, la transformation des fruits, le maraîchage et les petites laiteries produisant du lait pasteurisé, du yaourt et du fromage), la gestion de l'eau, les institutions partenaires et les entreprises sociales et solidaires, les réseaux d'entraide, la reconstruction des centres communautaires et des infrastructures.

Adresse et contact

FOKAL - OPEN SOCIETY FOUNDATION HAITI
143, Avenue Christophe BP 2720 HT 6112
Port-au-Prince,Haïti | Tel : (509) 2813-1694

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