Photographie/Concours : Autoportraits d’Haïti

EM22Qu’est-ce que notre image, produite par nous, reflète non seulement de nous mais de la société dans laquelle nous vivons ? C’est sur base de ce questionnement que FOKAL, à travers son programme Média, invite les photographes haïtiens en Haïti comme dans la diaspora à créer en participant à un concours d’autoportraits ouvert du 30 avril au 7 juin 2020 à minuit*. Un portrait de soi par soi, qui implique des informations sur qui l’on est, mais aussi sur la situation, le contexte, notre identité et à travers elle celle du groupe, de la communauté, de la nation à laquelle on appartient.

Loin du selfie, l’autoportrait explore les concepts de la définition de soi et joue pour cela avec les personnages, les archétypes, les stéréotypes. L’autoportrait peut mobiliser l’histoire et les mémoires collectives, familiales. Il réaffirme que le personnel est politique. Cette initiative tente de soutenir dans le secteur de la photogaphie une réflexion sur les identités haitiennes multiples, en passant par l’introspection à un moment où beaucoup sont contraints à l’exercice par le confinement.

Quelques fameux et fameuses auto-portraitistes contemporains :

Zanele Muholi

Depuis 2015, l’artiste sud-africaine Zanele Muholi a utilisé l’auto-représentation pour aborder les questions de race, de sexe, de discrimination, d’histoire personnelle et d’histoire politique africaine. Ses images, théâtrales, sont destinées à résister aux stéréotypes et à la discrimination et à renforcer l’idée que le personnel est politique.

La photographe parle d’une histoire et d’un passé qui ne furent pas suffisamment ou mal documentés, tout en évoquant le poids du racisme actuel. Mis en scène dans chaque autoportrait, les matériaux évoquent les douloureux épisodes de l’histoire sud-africaine et leurs problématiques contemporaines. Faisant de son corps le nouveau médium d’un projet politique, la série Somnyama Ngonyama (en zoulou, « Salut à toi, lionne noire ! ») est, selon l’artiste, « une reprise en main de sa noirceur » grâce à un dispositif qui joue des clichés avec humour et ironie pour mieux les broyer. Son but est de mettre à mal la représentation que font les médias des femmes noires. Se présentant de face et ornée d’accessoires, la photographe offre une lecture critique d’un certain regard ethnographique et de mode. Photographié, son visage se fait document et métaphore. En parlant d’elle-même, Muholi parle également de toutes les autres.

Lire l’article du Monde, Zanele Muholi, une activiste visuelle. 

Regarder une vidéo (en anglais), où l’artiste parle de sa série Somnyama Ngonyama. 

 

Cindy Sherman

Plasticienne et photographe américaine dont les séries d’auto-portraits offrent une critique de l’identité et du genre, Cindy Sherman est une figure clé de la photographie artistique de critique sociale depuis le début des années 80 et l’avènement de la diffusion de masse des images. Elle a débuté par la peinture mais s’est rapidement tournée vers la photographie afin d’explorer un vaste catalogue de personnages féminins incarnant des rôles sociaux communément acceptés. En tournant la caméra vers elle, Sherman voulait remettre en question l’influence séduisante mais souvent oppressante que les mass-media ont sur nos identités individuelles et collectives, le rôle assigné à la femme dans la société de consommation (femme au foyer, femme fatale, …). Désir sexuel et domination, possibilité de fabrication d’une identité propre comme l’une des plus vastes supercheries sont parmis les sujets inquiétants qui traversent le travail développé par Sherman dans ses autoportraits. Ces dernières années, Cindy Schermann continue son travail sur Instagram. @cindysherman

A lire, en Français, « Cindy Sherman » sur Art Wiki

A lire, en anglais, particulièrement sur son récent travail sur Instagram, un article du New York Times.

 

Samuel Fosso

En 1975, Samuel Fosso, d’origine nigériane et camerounaise, survivant de la guerre du Biafra avec ses grands-parents, ouvre le « Studio National » à Bangui, la capitale de la République Centrafricaine où il est venu rejoindre son oncle cordonnier. « Avec Studio National, vous serez beau, chic, délicat et facile à reconnaître » est son enseigne. Une fois la boutique fermée, il garde les chutes de péllicules de ses clients pour entamer un travail personnel et se tire lui-même le portrait. Son travail est repéré dans le cadre de la préparation de la première édition des Rencontres africaines de la photographie à Bamako, dont il remporte le premier prix. Ses autoportraits de lui travesti en Mao Tse-Toung, à travers lesquels l’artiste s’interroge sur les relations entre la Chine et l’Afrique, sa série « African Spirits », en hommage aux grandes figures du panafricanisme et de la lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis ou encore « Le Chef (qui a vendu l’Afrique aux colons) »sont aujourd’hui internationalement reconnues et convoitées par les plus grands musées.

Pour en savoir plus, lisez cette conversation entre Samuel Fosso et le commissaire Yves Chatap.

 

Nobukho Nqaba

Les autoportraits de Nobukho Nqaba interrogent les concepts de migration, de famille et de fragilité du foyer. En plus de se représenter physiquement, l'artiste sud-africaine imprime sur la pellicule ses douleurs et son combat, à la manière de sa dernière série, l'ayant aidée à faire le deuil de la mort de son père.

Lisez cet article au sujet de son travail.

Omar Victor Diop

Inspiré de la mode et de la photographie de studio, armé de fantaisie et d’humour, le dakarois explore l’air du temps mais aussi le passé à travers la représentation des contentieux historiques. Diaspora est une suite d’autoportraits inspirée par des figures de Noirs méconnus, mais pourtant bien présents dans la peinture européenne – espagnole notamment. Partis escalves, ils se sont libérés au fil de parcours extraordinaires et sont devenus des personnalités, bien que leurs histoires soient jusqu’à aujourd’hui occultées. Pour réaliser ces clichés, Diop revêt lui-même les habits de ces Africains devenus des personnalités en Europe du temps de l’esclavage et des colonies, mais y ajoute une perspective contemporaine : « En faisant porter à chacun des personnages des objets liés au football, ballon, carton rouge ou crampons, je les ai rattachés au présent, pour les inscrire dans le débat sur l’immigration et l’insertion des étrangers dans les sociétés européennes. Tous ces illustres inconnus sont les premiers à avoir fait reconnaître l’homme noir comme doué de capacités exceptionnelles. Aujourd’hui, c’est le football qui sert de passeport. »

Visitez le site de l’artiste.

Martin Parr

Mondialement connu pour son ironie et son travail sur les clichés, le photographe de Magnum a glané au fil de ses années de voyages des portraits hilarants de lui qu’il situe au cœur de l’imaginaire commun lié au développement du tourisme ou à l’exotisme.

Découvrez ses images sur le site des éditions Xavier Barral 

Ou sur le blog de Lensculture

 

Emilie Régnier et sa série How do you love me

Autoportraits en noir et blanc autour des cheveux et de l’identité, questionnant les parts d’elles qui sont blanche ou noire, le sont-elles assez ? Une série qui questionne une identité métissée et ce qu’elle révèle du racisme et des sociétés occidentales et africaines.

 

Lebohang Nkagnye et sa série Ke Leka Lafa – Her story 

La photographe diplomée du Market Photo Workshopà Johannesburg en Afrique du Sud, a entamé cette série 3 ans après avoir perdu sa mère, son lien principal au reste de sa famille et à leur passé, alors que tous ils vivent désormais dans des lieux différents. Sa mort a réveillé en elle un besoin de connexion à ses racines ancestrales. Elle avait besoin de se situer par rapport à sa famille élargie mais sans doute aussi de récréer du lien avec sa mère disparue. L’idée du fantome a ainsi émergé dans son travail. L’artiste a commencé à rechercher des traces, des souvenirs rappelant sa mère : elle trouva de nombreuses photographies mais aussi des vêtements, jusqu’alors sans importance. Elle y posait, tout sourire, dans diverses tenues. Sa reconnection avec elle devint une manipulation visuelle de leurs histoires et elle commença à introduire son propre personnage dans l’histoire picturale de sa mère, s’habillant exactement comme elle quelque 25 ans plus tôt. Ce fut sa façon de marrier leurs deux mémoires. Plus tard, elle va développer un travail de photomontage où elle juxtapose des images anciennes retirées des albums familiaux avec des images d’une version « actuelle » de sa mère à travers elle. Afin de reconstruire une nouvelle histoire commune où leurs personnages se confondent tout en affirmant une différence. Les photomontages sont devenus un substitut au manque de mémoire, le façonnement d’une identité, une conversation imaginée.

 

REGLEMENT DU CONCOURS
Les photographes haïtiens et haïtiennes, professionnels comme amateurs (vivant en Haïti ou dans la diaspora) ont jusqu’au 7 juin pour participer à ce concours d’autoportraits lancé par FOKAL en remplissant le formulaire qui se trouve sur le site de FOKAL avec les informations suivantes :

  • Une courte biographie ou un CV.
  • Un texte qui explique votre démarche.
  • Un lien de téléchargement de vos images.

Ce lien doit être accessible sans autorisation préalable. Les images doivent être maximum de 2500 pixels sur le côté long et de maximum 300 dpi. Les fichiers doivent être nommés comme suit :

NOM_TITRE DE L’IMAGE (pour les images individuelles)

NOM_TITRE DE LA SÉRIE_NUMÉRO DE l’IMAGE (pour les images faisant partie d’une série)

  • Des légendes qui accompagnent les images.

Chaque image doit être légendée avec le nom de l’auteur, la date, le lieu et éventuellement un titre. Le participant doit légender son image, même si elle peut être avec ou sans titre. Il doit indiquer le lieu (quartier, commune, pays) et la date de réalisation de l’image. Il peut écrire une légende descriptive ou littéraire. Il peut aussi écrire quelques lignes qui détaillent sa démarche pour chaque image dans le cas d’une série.

Exigences.

L’usage de photoshop est autorisé, la technique du collage l’est également. Les photographies réalisées avec un téléphone sont acceptées.

Les auteurs doivent autoriser la fondation à utiliser son/ses image(s) pour la communication du concours (diffusion sur les réseaux sociaux et web de la fondation, petit livret) mais ils restent propriétaires de leur travail.

Catégories

Il y a deux catégories : photos uniques et série. Dans la catégorie série, il s’agit d’une série cohérente de trois autoportraits minimum et de dix maximum. Un participant ne peut être récompensé qu’une seule fois et ne peut pas candidater aux deux catégories.

Le jury sera composé de : Ralph Dupoux, Axelle Liautaud, Nicola Lo Calzo, Tessa Mars, Emilie Régnier, Roberto Stephenson, Paolo Woods.

Les résultats seront annoncés le 15 juin via mails aux gagnants et participants et sur les réseaux sociaux de FOKAL.

Catégorie image unique

1er prix : 300 USD + 1 livre de photographie

2ième prix : 200 USD + 1 livre de photographie

3ième prix : 100 USD + 1 livre de photographie

Catégorie série (de 3 à 10 images)

1er prix : 600 USD + 1 livre de photographie

2ième prix : 400 USD + 1 livre de photographie

3ième prix : 200 USD + 1 livre de photographie

Autres liens et infos pour aller plus loin :

Autoportait photographique.

Vous pouvez également faire des recherches concernant les autoportraits de Robert Mapplethorpe ou le travail de Rosana Paulino. 

Chez les peintres : explorer les travaux de Rembrandt, Kahlo, Van Gogh, Schiele, Munch, qui tous ont beaucoup travaillé sur l’autoportrait et participé au renouvellement du genre. Des peintres haitiens comme Mario Benjamin ont également travaillé sur cette notion.

Écoutez la très belle émission « Les chemins de la philosophie » où il est question des autoportraits de Rembrandt.

 

Crédit photo : Emilie Régnier, How do you love me 

*La date limite, préalablement fixée au 31 mai, a été avancée au 7 juin. 

Adresse et contact

FOKAL - OPEN SOCIETY FOUNDATION HAITI
143, Avenue Christophe BP 2720 HT 6112
Port-au-Prince,Haïti | Tel : (509) 2813-1694

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