Réponse aux questions posées autour de l’appel « Enquêtes et grands reportages pour les 10 ans du séisme »

 appel enquêtes 1Une séance d’information autour de l’appel lancé par le Programme Média de FOKAL, « Enquêtes et grands reportages pour les 10 ans du séisme », s’est tenue ce mardi 23 juillet 2019 sous la tonnelle de FOKAL à destination des journalistes désireux de recevoir plus de précisions. Maude Malengrez, responsable de ce programme, ainsi que Danièle Magloire, militante des droits humains, membre du conseil d’administration de FOKAL et membre du jury qui sélectionnera les projets soutenus, ont répondu aux questions des journalistes présents.

Lors de l’introduction, il a été rappelé que la commémoration du séisme de 2010 aurait une ampleur particulière. La couverture internationale sera probablement de grande envergure, ce pour quoi il est important qu’il existe un regard haïtien construit sur Haïti dans la Presse, et que ce ne soit pas uniquement la Presse internationale qui établisse son « bilan ». Que les Haïtiens et Haïtiennes puissent parler pour eux-mêmes, de leurs situations et de la situation du pays. C’est dans cet esprit que cette initiative a été lancée, pour donner l’opportunité aux journalistes de parler d’Haïti, de choisir des angles spécifiques, de poser des questions qu’ils jugent pertinentes pour la société, en réalisant des travaux pour lesquels ils ne disposent pas encore des compétences ou moyens nécéssaires.

L’idée de cet appel n’est pas de s’attarder sur des lamentations sur les manquements de l’État ou de la communauté internationale, bien que des faits liés à ces manquements puissent être signalés. Les histoires recherchées tournent autour de ces grandes questions : qu’est-ce que le séisme et la gestion de la catastrophe a représenté pour nous ? Pour notre société ? Pour certaines catégories de la population ? Quels changements fondamentaux ont été provoqués par le séisme : que ce soit au plan social, économique, politique, religieux, etc ? Il s’agit d’ouvrir au maximum les horizons et d’aborder les sujets avec originalité. Par exemple, si l’on prend le cas très visible et marquant de Canaan dans la zone métropolitaine : qu’allez-vous regarder dans Canaan qui soit original ? Quel problème se présente dans ces nouvelles communautés que vous pouvez explorer ?

Une chose essentielle est de réaliser le travail dans une perspective soucieuse des droits humains. Qu’est-ce que cela veut dire ? Qu’il ne s’agit pas simplement d’exposer des communautés et des individus dans leur détresse sans prendre en compte leur dignité, leurs aspirations, les batailles qu’ils mènent, de telle sorte que ce ne soit pas une image de personnes simplement abbatues qui soit projetée. La vie de tous les jours nous démontre que malgré toutes les difficultés, la population bataille pour sa survie, que les solutions qu’elle trouve peuvent ne pas toujours être les meilleures, mais que les gens se démènent pour trouver des portes de sortie. Nous voulons éviter de soutenir des discours misérabilistes ou d’apitoiement pour encourager un regard critique et inventif sur la réalité.

Les journalistes doivent pouvoir découvrir quelque chose qu’ils ne connaissaient pas en réalisant ce travail. Pour cela, il faut que le journaliste puisse proposer une hypothèse solide basée sur des recherches ou réfléxions préalables qui rendent sont questionement pertinent. Il doit pouvoir expliquer la méthode qu’il va utiliser pour répondre aux questions qu’il se pose et travailler son hypothèse de départ.

L’appel est ouvert pour tout type de presse : radio, télévisée, écrite, multimédia. Le formulaire de l’appel est en français, mais il est possible de le remplir en créole, au choix. Les rubriques du formulaire sont accompagnées de questions qui permettent aux candidats de structurer leur proposition. Un tutoriel est également disponible avec le formulaire intégral pour les aider à remplir le formulaire avant de le remplir en ligne.

L’appel se cloture le 20 août 2019. Avant la fin août, le jury se réunira pour sélectionner les projets soutenus. Autour du 8 septembre 2019, un premier atelier sur l’organisation des enquêtes sera réalisé en collaboration avec le journaliste et professeure Jane Regan, ancienne responsable du projet d’investigation Ayiti Kale Je. Par la suite, et selon les besoins des projets, différents formateurs aborderont des aspects sécifiques des projets et de l’investigation avec les porteurs de projets.

Parmis eux  :

  • Nadège Green, une journaliste d’investigation haïtiano-américaine basée à Miami qui couvre les questions de violence par arme à feu et de justice pour les réseau des radios publiques WLRN et dont le travail d’investigation a été honoré par différent prix prestigieux. Son travail a notamment été publié par la NPR, PRI et le Miami Herald.
  • Arnaud Robert, journaliste Suisse qui collabore avec le journal Le Temps, la radio Suisse romande mais également Le Monde, Les Inrockuptibles, National Geographic, Live Magazine, Heidi News ;
  • Médiapart, LE média d’investigation en France, dirigé par Edwy Plenel ;
  • Jake Johnston, journaliste d’investigation au Center for economic and policy research (CEPR) aux Etats-Unis et auteur notamment de l’enquête « Our boss will call your boss » sur le cas des mercenaires américains présents en Haïti en février 2019.
  • Le photographe franco-vénézuelien Mathieu Asselin, auteur de « Monsanto, une enquête photographique ».

Chaque trois semaines durant les 4 mois de septembre à décembre 2019, un espace de travail/suivi des travaux sera établi qui réunira l’un de ces mentors et les porteurs de projets d’enquête sélectionnés. Des masterclass sur des techniques spécifiques seront organisés pour les participants, tandis que les mentors seront disponibles individuellement pour répondre aux questions et défis de chaque projet d’enquête ou de grand reportage, qu’il s’agisse de l’organisation du travail et des informations, de la méthode d’enquête, des techniques d’interview, de travail des accès, de storytelling (radio, écrit, photo, multimédia,…), de data mining, etc. Les formations seront précisées en fonction des besoins des projets retenus.

Un des objectifs de cette initiative, outre le soutien financier à des travaux, au développement de compétences spécifiques, est également de soutenir le développement d’un réseau pour les journalistes haïtiens, les sujets d’investigations ayant très souvent une ampleur transnationale.

Questions des journalistes présents :

appel enquetes 3Y aura-t-il une récompense pour le meilleur reportage à la fin ?

Non. Les projets qui seront retenus par le jury bénéficieront des fonds nécéssaires à la réalisation de leur travail, ainsi qu’un encadrement régulier par des mentors, et un appui technique à la diffusion (adaptation, traduction). Il ne s’agit pas d’un prix, mais d’un fonds d’appui qui permettra à des journalistes de réaliser le projet désiré et de développer de compétences sur l’investigation. L’idée est de permettre à des journalistes de faire un travail que la presse locale n’a pas toujours les moyens de réaliser.

Comment sera constituté le jury ? 

Nous n’avons pas encore le jury au complet, mais nous avons les profils recherchés : Le jury sera constitué des mentors qui ont des compétences spécifiques sur les techniques d’enquêtes et d’investigations [cités plus haut], mais également des membres du secteur médiatique haïtien et de la société civile (secteur des droits humains, de la recherche et secteur professionnel), afin de garantir une perspective haïtienne informée dans le choix même des projets d’enquête.

Est-ce qu’il y a un nombre de dossiers précis par catégorie (radio, presse ecrite, …) ?

Non. Dans l’idéal, nous aimerions pouvoir soutenir des projets diversifiés dans leur forme et leur canal de diffusion, mais c’est la qualité des projets et l’expertise des candidats qui seront les premiers critères de sélection.

Combien de projets seront soutenus ?

Il est difficile de savoir précisément tant que nous n’avons pas reçu les propositions, mais nous pensons pouvoir soutenir la réalisation de 6 à 10 projets sur 4 mois ; cela dépendra des propositions reçues et des moyens nécéssaires à la realisation des enquêtes. Il est certain que les budgets seront appréciés selon le niveau de détail et de correspondance des prix indiqués par rapport aux prix réels et aux pris du marché. Nous insistons pour que les budgets reçus soient réalistes et correspondent aux moyens strictement nécéssaires à la réalisation des projets.

Est-ce que cette initiative a le soutien d’autres bailleurs ou partenaires ?

Certains des spécialistes qui interviendront dans l’accompagnement sont engagés dans le projet comme partenaires, c’est le cas de Mediapart. Il n’y a pas pour l’instant d’autres bailleurs sur le projet. Cependant, un candidat à cet appel peut chercher des soutiens financiers ailleurs pour compléter une partie du projet qui ne pourrait pas être pris en compte par FOKAL, à partir du moment où ces fonds ne compromettent pas la réalisation de l’enquête (comme cela pourrait être le cas de fonds liés à des intérêts de communication de certains bailleurs par exemple).

Pour remplir le dossier, il est question de démontrer son expérience à travers des travaux antérieurs, est-ce que ce sont des travaux antérieurs sur le sujet déposé ?

Les travaux antérieurs ne sont pas forcéments liés au projet que vous voulez développer. Ils sont là pour démontrer votre expérience et savoir-faire journalistique, votre style, la façon dont vous abordez la réalité en choisissant des angles spécifiques. Ils peuvent donc être liés à des sujets totalement différents.

Quand vous parlez de recherches et réflexion préalables pour réaliser la proposition, de quoi s’agit-il ?

appel enquetes 2Pour ce qui est des recherches préalables pour développer votre projet, nous voulons parler du fait que les questions que vous vous posez doivent avoir une base de réflexion solide. Vous devez prouver que la question que vous vous posez et à laquelle vous voulez répondre est basée sur des faits que vous connaissez et que vous voulez explorer. Par exemple, une hypothèse ne peut pas être basée sur l’expérience d’une seule personne, sur une simple intutition sans qu’elle soit étayée par des faits. Il faut également pouvoir argumenter : pourquoi ce sujet est intéressant aujourd’hui ? Comment voulez-vous l’aborder ?

Est-ce que quelqu’un qui n’a pas de travaux journalistiques préalables peut postuler ?

Non. L’investigation journalistique ou le grand reportage est un travail difficile qui demande à la personne qui le réalise d’avoir déjà une certaine expérience dans la pratique du journalisme. Nous visons des journalistes en exercice, même lorsqu’ils sont au début de leur carrière.

Doit-on travailler seul ?

Non, vous pouvez être deux personnes. Nous incitons les candidats à préciser pourquoi : quelles sont les compétences différentes, complémentaires, les points forts des deux personnes ? Pourquoi est-ce indispensable à le réalisation de l’enquête ? Les collaborations avec des journalistes en province sont encouragées sans être obligatoires.

Est-ce que nous devons préciser les personnes ressources auxquelles nous ferons appel ?

Oui, en tout cas pour le type de personnes ressources dont vous aurez besoin pour mener à bien votre projet. Cependant nous tenons à préciser que cela n’est pas en soi une méthode de travail. Pour le dire autrement : vous devez découvrir quelque chose à travers votre travail, et non réaliser une collection d’entretiens avec des experts. Vous pouvez vous baser sur les recherches de personnes ressources et utiliser leurs informations pour démontrer quelque chose que vous découvrez sur le terrain, ou confronter ces informations au terrain.

Est-ce qu’il y a des sujets que cet appel veut voir traité ?

Il n’y a pas de sujet prédéterminé, outre le fait que ces travaux doivent être réalisés autour des conséquences du séisme. Seule la qualité du dossier et la façon dont il répond aux exigences de l’appel comptent, en terme de clarté, de méthode et de sérieux.

Pour remplir le formulaire, il est question d’obtenir un accord de diffusion écrit de la part d’un média haïtien. Cependant, il y a peu d’espaces en Haïti où diffuser des travaux photograpiques ?

Il y en a peu mais il en existe, particulièrement dans la Presse en ligne. Pour ce qui est des projets photographiques, il ne s’agira pas uniquement de photographies, car l’enquête nécéssite également un texte/du son et des légendes, ce qui peut intéresser la presse en ligne et favorise le développement de projets multimédia.

 

Adresse et contact

FOKAL - OPEN SOCIETY FOUNDATION HAITI
143, Avenue Christophe BP 2720 HT 6112
Port-au-Prince,Haïti | Tel : (509) 2813-1694

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