EXPOSITION : « "Enfermé(e)s-Libéré(e)s" »

«  Les lettres mortes, ou comment l'art peut redonner vie aux mots »

À partir du 2 février 2018

Atrium de FOKAL

FOKAL Expo marionnettes BA 6901 WEB avec TAG 1 « ... ». Labonté Marcel. Le 21 septembre 2015. Un petit papier parmi tant d'autres. Un petit papier parmi les centaines récupérés il y a quelques mois, des mains d'un substitut du commissaire du gouvernement qui les accumulaient, jour après jour, dans un vieux sac plastique.

Tous ces hommes, toutes ces femmes entassés entre les murs d'un Etat qui s'effondre. Les murs s'effondrent, mais les hommes et les femmes restent là, entassés, étouffant d'oubli. Et ces mots qui, comme jetés à la mer, coulent avec le bateau...

Labonté Marcel a été arrêté le 8e mois de l'année 2008. Il a écrit cet appel à l'aide le 21 septembre 2015. Il est mort, en prison, le 8 février 2017. Ces murs sont devenus sa tombe. Après 9 ans de détention arbitraire. Sans jamais avoir été jugé.

Durant les funérailles organisées pour Marcel et des dizaines d'autres détenus en février 2017, le BDHH a manifesté son indignation devant la catastrophe sanitaire qui ravage le Pénitencier. S'il était trop tard pour lui, l'histoire aurait pu être différente pour Thomas Dilus. En prison, il avait entendu parler de l'appel public du BDHH durant ces affreuses funérailles collectives. Il était entré en contact avec l'équipe juridique en avril 2017·

Après de nombreux efforts, le BDHH était parvenu à déterrer son dossier pour qu'il soit enfin « mis en état d'être jugé ». Comme celui de centaines de détenus, son sort aurait dû se dénouer durant les assises criminelles de cet été.

Malheureusement, celles-ci n'ont pas eu lieu. Grève des greffiers. Cette année, personne n'a été jugé. Thomas Dilus, lui, ne le sera plus jamais.

Il est décédé dans la nuit du 30 au 31 juillet 2017. Après 5 ans de détention préventive. «Prolongée », comme on dit. Interminablement provisoire.

Heureusement, l'histoire s'écrit parfois d'une autre manière. Peu après les funérailles de Marcel Labonté, le BDHH entrait en contact avec l'association 4 Chemins pour monter un projet théâtral sur la prison. Par la même occasion, l'association confiait au BDHH le dossier d'un marionnettiste, arbitrairement détenu depuis près d'un an.

Paul Junior Casimir, dit Lintho, a été libéré le 23 mai 2017. Comme la plupart des bénéficiaires des services d'assistance légale, la secrétaire générale du BDHH, Pauline Lecarpentier, l'a rencontré, avant de le dessiner.

FOKAL Expo marionnettes BA 6881 WEB avec TAG 7

Une trace parmi d'autres de l'enfermement, de l'arbitraire, de l'espoir, de l'humanité.

Quelques semaines plus tard, le BDHH installait dans son local un atelier de création. Dès le mois de juin, sur la Place St Anne, Lintho participait avec ses premières marionnettes au Festival "Nou pran lari a".

En novembre 2017, en prélude au Festival 4 chemins, commençait à l'Institut français d'Haïti le cycle "Prison interminablement préventive, un mois sur le milieu carcéral haïtien".

Avec, en son coeur, l'exposition "enfermé( e )s-libéré( e )s", mise en scène par Guy Régis Jr.

Rassemblant plus de 80 marionnettes à taille humaine, créées par Lintho en à peine quelques mois, dans un long cri silencieux, une création frénétique, un besoin urgent et impérieux de se libérer de cette image mentale de la prison, celle de ces dizaines, de ces centaines de détenus entassés dans cet univers quasi concentrationnaire...

Rassemblant aussi plus de 40 portraits d'hommes et de femmes victimes de détention arbitraire, saisis sur le fil de leur libération…

Rassemblant encore des photos prises en octobre 2016 par Seyi Rhodes, un journaliste anglais, lors du tournage du documentaire "la prison de l'enfer". Parmi elles, une photo de Thomas Dilus, comme une pièce égarée dans cet immense puzzle de la vie.

Rassemblant enfin ces dizaines de "petits papiers" griffonnés, un jour, par des détenus, des papiers oubliés, des hommes engloutis par la machine judiciaire.

L'exposition offre à ces mots une occasion inattendue d'être lus. De franchir ces murs de silence, d'interpeller le monde du dehors, celui des vivants.

Venant clore ce premier tour de passe-passe entre l'art et la justice. la pièce Gouyad Senpyè a été jouée quelques jours plus tard, avec la participation d'anciennes détenues. Un triomphe.

Quand l'art se mêle de justice.

Un projet surréaliste, trop grand, de porter la voix des victimes de l'arbitraire. De redonner vie aux mots.

Des ramifications profondes, des liens étroits, puissants, tissés entre l'action judiciaire, la création, et l'indignation.

Pauline Lecarpentier

Secrétaire générale du Bureau des Droits Humains en concentrationnaire...

Haïti (BDHH) - Biwa dwa moun,

le 1er février 2018.

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