Discours de Danièle Magloire à la commémoration du séisme du 12 janvier

Discours prononcé par Danièle Magloire, vice-présidente du conseil d'administration de FOKAL, à la commémoration du séisme du 12 janvier 2010, au Parc de Martissant

FOKAL 12 janvier 2018 Parc Martissant BA 1794 WEB avec TAG 14 Medam fanm yo ! C’est ainsi que la population a nommé les féministes qui, à la chute de la dictature des Duvalier en 1986, ont repris le flambeau de la lutte pour le respect des droits humains des femmes. Medam fanm yo, ces dames qui défendent la cause des femmes. Anne-Marie Coriolan, Magalie Marcelin et Myriam Merlet étaient des figures de proue de ce mouvement.

En dépit d’une méfiance vis-à-vis du mouvement féministe, cette appellation de Medam fanm yo signifiait toutefois une certaine reconnaissance d’un engagement social ancré dans les réalités sociopolitiques de notre pays. En effet, Medam fanm yo, ont été et sont de tous les combats pour la construction d’une démocratie inclusive, pour la justice sociale. Marche historique du 3 avril 1986 pour l’inclusion sociale et politique des femmes, protestations et résistance face aux dérives des gouvernements, plaidoyer pour les droits spécifiques des femmes, le droit à l’alimentation et au logement, vigilance citoyenne sur les questions liées à la souveraineté nationale. Les chansons de Manno Charlemagne ont accompagné cette quête citoyenne. Mèsi Manno, pou tout chante patriyotik ou ofri peyi a. Mèsi pou chante ki rann omaj bay manzè Defile ak lit fanm yo. Chapo ba pou ou Manno! Nou pa p dòmi bliye.

En cette huitième commémoration du séisme de 2010, nos pensées vont à toutes les personnes disparues et à leurs proches. Nous songeons particulièrement à toutes les familles qui sont encore astreintes à vivre dans des abris de fortune, dans des conditions déshumanisantes.

Le temps passe. Nous berçons nos douleurs pour avoir la force de continuer à avancer avec lucidité vers demain, un demain profitable à l’ensemble de la collectivité.

Medam fanm yo, les féministes disparues. Nous savions combien il était dur d’être féministe, de se positionner publiquement comme telle. En dépit de l’immense vide créé par les diverses pertes dans nos rangs, fidèles à nos engagements collectifs, nous continuons à œuvrer pour préserver nos conquêtes et transmettre notre matrimoine. Il est particulièrement dur d’être féministe depuis le séisme. Nous sommes confrontées à une régression vis-à-vis des droits humains, au vent virulent du fondamentalisme religieux de certains courants du protestantisme, qui s’attachent à décerveler les populations et s’attaquent sans relâche à la religion vodou, à la culture populaire, aux droits fondamentaux des femmes, à l’orientation sexuelle des personnes. Ce phénomène d’importance tend à fracturer notre société en prônant l'exclusion et l’intolérance. Mais nous sommes déterminées à y résister.

Nous voulons et nous devons contribuer à lever une brise vivifiante sur notre société, pour qu’Haïti finisse par ressembler à ce lieu de verdure qu’est le Parc de Martissant où une place spéciale est réservée aux femmes disparues.

Ayibobo pou Medam fanm yo!

Danièle Magloire

Port-au-Prince, 12 janvier 2018

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